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Ma nature profonde..
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16 novembre 2016

Les pêcheurs de lune

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Jadis, en bordure de la forêt de Carnelle, à une journée de marche en amont du confluent de l’Oise et de la Seine, il y avait à l’emplacement de l’actuelle ville de L’Île-Adam, dans le Val d’Oise, une bourgade celte connue sous le nom de Noviangetumn.  

Tout aurait été pour le mieux dans le meilleur des mondes antiques si la lune n’avait donné autant de soucis aux habitants de Noviangetumn. En effet, ils ne se consolaient pas de voir cet astre capricieux disparaître en partie ou en totalité sans qu’ils sachent pourquoi. Pourtant, ce n’était pas faute de l’honorer d’un culte scrupuleux et de l’implorer quotidiennement afin qu’elle se montre toujours dans toute sa splendeur. Peine perdue : certaines nuits, la lune s’amenuisait mystérieusement pour reparaître de la même façon. Cette infidélité provocante laissait les pauvres Noviangetumnois perplexes.

Les anciens, lorsqu’on leur posait la question, prétendaient en hochant gravement la tête qu’il n’en avait pas toujours été ainsi. Néanmoins, ils se montraient incapables de préciser l’origine de ces disparitions, si régulières qu’on s’y référait pour mesurer le temps.

- Mais pourquoi repousse-t-elle tous les mois ?" leur demandait-on.

- Par Bélénos!! Elle repousse parce que ... c'est une sorte de champignon!"

Personne ne paraissait convaincu, car il fallait encore expliquer pourquoi ce champignon céleste se promenait au-dessus de la tête des gens et comment il s’accrochait.

Autre mystère : le soleil. D’où venait ce feu bienfaisant qui se montrait si féroce l’été alors qu’il faisait chaud et si timide l’hiver, quant on en avait le plus besoin ? Les habitants de Noviangetumn vivaient donc dans la crainte de voir l’astre du jour se mettre à disparaître comme l’astre de nuit, ce qui, hélas, se produisait parfois (à chaque terrifiante éclipse). Bien sûr, à l’intérieur des huttes, de grands feux étaient entretenus sous les marmites pansues. Mais par les nuits sans lune, la campagne alentour paraissait immense et hostile malgré les miettes de lune éparpillées que sont les étoiles et qui ne suffisaient pas à la remplacer.

- Par Toutatis, que deviendrions-nous sans soleil et sans lune, dans la nuit noire ?"

**

Un jour, un Noviangetumnois plus futé que les autres suggéra de se rendre à l’endroit où le soleil surgissait de terre chaque matin, là-bas, vers l’est, dans le but d’en attraper un morceau. Il suffirait ensuite de grimper au plus haut sapin et de lancer la lumière solaire ainsi capturée pour ré-ensemencer le ciel. Ce serait plus facile que de dérober un fragment de lune car pour cela, il aurait fallu voyager jusqu’au bout de la nuit.

Sitôt dit, sitôt fait. On le vit alors partir en direction de l’orient en tête d’une cohorte de chariots transportant de grandes jarres aptes à contenir des fragments de soleil.

Arrivés au bout du plateau, les hommes de l’expédition attendirent le lever du jour. Las! Le soleil brillait encore plus loin. Ils se remirent en marche, et sans doute cherchent-ils encore, car on ne les a jamais revus.

Or, ne voilà-t-il pas qu’un soir de pleine lune, on entendit de grands cris du côté de la cabane du forgeron. C’était la femme de cet artisan qui criait :

- Venez, venez voir!! Elle est là!"

Tout le monde sortit et se précipita vers la mare où le forgeron avait l’habitude de faire tremper le fer chauffé à blanc. La bouche de tous les Noviangetumnois s’arrondit d’extase : c’était vrai, la lune était là! Au milieu de l’eau, elle luisait doucement. Un morceau de lune tombé ici sans qu’on sache comment avait repoussé dans l’Oise !

- Ah, cette fois elle ne nous échappera pas !!"

Le forgeron, tout pénétré de son importance, déclara à tout un chacun que ce miracle ne l’étonnait pas: le Dieu protecteur des forgerons n’était-il pas le grand Lug, esprit de la lumière ? Et lui-même n’était-il pas le meilleur et le plus scrupuleux des ouvriers?

Nul n’en doutait. Pensez si on le félicita ; restait à repêcher ce morceau de lune bien tentant.

On alla quérir un grand seau qu’on attacha à une corde, et hop ! le plus âgé et le plus jeune du village le lancèrent au milieu de la mare où il atterrit avec un grand plouf. On hala le seau. Las! Il était vide! Rien qu’un peu d’eau boueuse qui n’éclairait rien du tout ...

Tandis que tout le monde se penchait au dessus du récipient pour mieux voir et se lamenter, la surface de l’Oise reprit sa tranquillité et la bouture de lune se remit à luire dans toute sa splendeur.

On recommença l’opération, mais en vain. La lune semblait narguer ses adversaires. Ce fut à chaque fois un beau concert de lamentations, de regrets, de remue-ménage auxquels répondirent bientôt les grognements des cochons dans l’enclos du forgeron, que le bruit avait réveillés ...

(À suivre)

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Commentaires
G
Ils n'étaient pas très futés...
Répondre
E
Oh oui, s'il te plaît, la suite ...
Répondre
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