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Ma nature profonde..
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femme
30 octobre 2016

La folle escapade

 

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Des paysages d’une rare beauté, d’innombrables forteresses et châteaux, une diversité incomparable, voilà ce qui caractérise la Thuringe, terre qui vit naître celle qui allait devenir un jour une de nos plus grandes reines mérovingiennes, et surtout, la première "faiseuse de paix" de l'Histoire des Francs: Radegonde.

Située au nord du royaume franc, la Thuringe est de longue date une menace à laquelle Clovis doit faire face. Mais ce sont les fils du grand roi franc qui vont définitivement asservir ce peuple turbulent.

Cela se passe au VIe siècle de notre ère. La Thuringe appartient alors aux trois frères Francs germaniques (1) Berthaire (père de Radegonde), Badéric et Hermanfried. Ces trois-là ne dérogent guère à la coutume franque qui consiste à se zigouiller entre eux jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un.

Se débarrasser de Berthaire est relativement aisé, ce qui fait qu’à l’âge tendre de 3 ans, Radegonde se retrouve dans les trophées de guerre de son oncle Hermanfried. Lorsque sonne l’heure d’alléger à son tour Badéric de sa part du royaume, la lutte s’annonce plus acharnée, c’est pourquoi Hermanfried va crier besoin chez Thierry son voisin.

Bon là, je le sens, je vous ai perdus.

Eh bien Thierry, roi d’Austrasie, est le fils aîné de Clovis. Il se partage la France avec le dernier frère qu’il lui reste, Clotaire, roi de Neustrie, vu que tous les autres héritiers sont déjà passés de vie à trépas (toujours la mode franque).

Hermanfried, pour obtenir l’aide de Thierry, lui promet de lui donner la moitié des terres de son frère s’il l’aide à le tuer. Sauf qu’une fois Badéric liquidé, Hermanfried oublie sa promesse ..

Clotaire pour venger Thierry surgit hors de la nuit, et de la pointe de l’épée signe sur la tronche d’Hermanfried un C qui veut dire Kaputt. La bataille a lieu au bord d’un fleuve, et le carnage est tel qu’en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, le lit de la rivière est encombré de cadavres dont les Francs de Clotaire se servent comme d’un pont pour passer d’un bord à l’autre, faisant ainsi preuve d’un esprit pratique qui laisse pantois.

Outre de nombreuses richesses, les deux rois francs découvrent dans cette terre hostile un joyau d'une valeur incommensurable : Radegonde, qui est d'une beauté éblouissante. L'attrait qu'exerce cette ravissante fillette sur les deux hommes est tel que, lorsque vient le moment de se l'attribuer lors du partage du butin, ils en viennent presque aux mains (ce qui est surprenant, vous en conviendrez, lorsqu’on sait comme ces gens-là sont civilisés). Finalement ils décident de la tirer au sort, sort qui oblige Thierry à abandonner la petite princesse à son frère.

Radegonde, résignée, fait son balluchon pour être trimballée cette fois avec le reste du butin de guerre à Soissons, où se tient la cour de Clotaire, laissant derrière elle le royaume de ses pères qui n’est plus qu’une ruine.

Malgré son peu de moralité, le roi de Neustrie éprouve quelque scrupule à épouser une enfant impubère (petite précision : pour les Francs, le mariage se réduit en fait à la consommation charnelle..). Clotaire reste donc dans son palais avec seulement Arégonde (2), sa deuxième épouse, ainsi que quelques concubines officielles,  pendant que Radegonde est emmenée de force à la villa royale d’Arthies en Picardie, où elle reçoit d’Ingonde, la première épouse de Clotaire, une éducation intellectuelle et religieuse très poussée.
Pour se changer les idées des meurtres épouvantables dont elle a été le témoin en Thuringe, la jeune princesse, qui a vu ses parents et ses amis égorgés puis abandonnés sans sépulture aux charognards, se donne corps et âme aux études. Elle bénéficie à Arthies de l'enseignement des meilleurs professeurs, qui lui transmettent les subtilités de la culture classique ainsi que, malgré ses origines païennes, une fervente piété religieuse. Radegonde fait preuve d'une grande intelligence, au point qu’elle est considérée comme une des femmes les plus brillantes de son temps.

C’est donc vers une Radegonde raffinée et très cultivée que les regards de Clotaire se tournent lorsque Ingonde meurt, à seulement 35 ans.

Radegonde est alors âgée de 18 ans. Mais comme on s’en doute, le temps qui a passé depuis son enlèvement n'a pas fait oublier à la princesse que c’est Clotaire qui a assassiné toute sa famille, aussi Radegonde ne saute-t-elle pas de joie à l’idée d’épouser son tyran (i.e. partager sa couche, je rappelle). Seulement voilà : tout comme les femmes romaines, les femmes franques sont subordonnées à la volonté des hommes, si bien que la seule issue pour Radegonde est de prendre ses jambes à son cou. Ce qu’elle fait avec la complicité de ses servantes.

Par une nuit sans lune, le petit groupe de femmes embarque sur un frêle esquif qui glisse silencieusement sur les eaux de l'Omignon. Malheureusement, les fugitives naviguent dans la mauvaise direction, se rapprochant dangereusement de Vitry où on est en train d’organiser le banquet de mariage. Comprenant leur erreur peu après Péronne, elles font demi-tour et remontent le courant à la rame, mais le cours d'eau devient impraticable. Radegonde entraîne alors sa suite à continuer à pied, en portant la barque à bout de bras, jusqu’à l'Oise. De là, la jeune femme et ses compagnes remontent la Seine, au risque de se rapprocher de Paris qui est alors aux mains de Clotaire, puis bifurquent par l'Aisne vers le nord pour rejoindre le royaume de Thierry. Elles traversent Soissons sans encombre mais sont reconnues près de Missy, des portraits robots ayant été diffusés dans tout le royaume par le cruel Clotaire.

C'est comme ça que s'achève la folle escapade. Puisque la future reine est à Soissons, Clotaire décide de la rejoindre dans sa capitale, pour que le mariage y soit célébré …

 

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Dans les prochains épisodes:

(1) Où l'on apprendra un peu plus qui étaient les Francs.

(2) Où l'on s'émerveillera de l'ingéniosité de ceux-ci pour se trouver épouse(s).

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20 octobre 2016

Ma nature profonde

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C’était il y a très longtemps (ça doit être mon côté Cancer qui fait ça, j’ai toujours aimé les choses d’il y a très longtemps.. Ma mère disait toujours que je ne suis pas née à la bonne époque, que j’aurais dû naître super avant, genre à l’époque des preux chevaliers, moi j’aurais été une princesse et on se serait battus pour mes beaux zyeux, tout ça. Sauf que si c’est ma nature profonde d’aimer ce qu’il se passe avant, ben ma mère de l’époque des chevaliers elle m’aurait dit que j’aurais dû naître au temps des Cro-magnons.. et ainsi de suite).

Bref.

Or donc, c’était un temps d’il y a très longtemps. À cette époque, on ne croyait pas à la logique linéaire, binaire et dualiste. D’ailleurs, on ne croyait pas à la logique du tout. Avant tout, c'était un monde organique, dans lequel les événements étaient liés entre eux. La destinée humaine ne se trouvait pas dans la libération, mais dans la liberté, celle qui n'a que faire de comprendre la vie mais qui permet de s’initier à elle. En ces temps anciens, pas de certitudes philosophiques : seulement des relativités s’exprimant par le sacré et la poésie, par des correspondances secrètes entre des mondes magiques. L’éveil de la conscience ne se faisait pas par la pensée, parce que la vie et le rêve appartenaient au même monde.

Approchez-vous, je vous en prie, approchez-vous de ce monde. Vous y verrez des hommes et des femmes en train de célébrer Lug, l’époux de la déesse Brigit, ce même Dieu qui a donné son nom  à la ville de Lyon (entre autre) dont la Fête des Lumières qui perdure de nos jours trouve là son origine.

Voyez les hommes, avec leurs pantalons étroits et collants que les Romains appelleront des bracca  (braies). Des guêtres de tissu sont fixées au bas de leurs jambes et couvrent leurs gallicae (sandales). Sur le torse, ils portent un gilet serré recouvert d'une blouse. Chez certains, cette saie est rayée, sur d’autres elle est en tissu de laine unie ou bien à carreaux. Elle est ajustée à la taille par une ceinture, avec ou sans manches (les Romains appellent celles avec manches palla gallica).

Les femmes, elles, portent une tunique serrée qui s’enfile par la tête, sans ceinture si elle est longue et avec si elle est courte, parfois plissée, ce qui lui donne de l’ampleur. Ornée de franges ou de dentelures en bas, doublée de laine ou de fourrure qui dépasse sur les bords, la tunique a des manches collantes jusqu'aux poignets. Elles se portent souvent par deux, superposées, la plus longue sert alors de lingerie de corps.

Comme elles sont belles ces femmes, dont les plus jeunes en toges immaculées suivent les druides et les bardes, portant avec préciosité les plantes rituelles et sacrées que sont le blé et la bruyère.

Grande divinité celtique omniprésente en Gaule, Lug est le dieu de la synthèse: il vient du passé, du présent et du futur, il est issu du monde de l'esprit et du monde de la matière, il est le fils de la lumière et des ténèbres, du ciel et de la terre, de la vie et de la mort. C’est pourquoi le jour où on le fête est aussi l’occasion de célébrer les mariages, qui en ces temps sensés sont une institution souple, un contrat dont la durée n'est pas forcément définitive. La femme choisit librement son époux et en se mariant, elle n’entre jamais dans la famille de ce dernier, elle appartient toujours à sa famille d'origine, le prix versé par le mari pour l'achat de sa femme n'étant qu'une compensation donnée à la famille de celle-ci. D’ailleurs, en cas de divorce, elle retourne dans sa famille d'origine (divorce qui se fait par consentement mutuel, sauf en cas de maltraitance de la femme par son époux - la séparation chez les Gaulois n'est qu'un contrat qui cesse).

D'ailleurs, pour eux, se marier n’est pas une obligation. Ils peuvent aussi vivre dans une sorte de concubinat, néanmoins réglementé par des règles strictes - par exemple, si l’homme est déjà marié il ne peut prendre une concubine qu'avec l'accord de sa légitime.

Eh oui, le mariage gaulois ne s'embarrasse pas de cérémonies rigides et compliquées. Seules les convenances d'âge, de naissance et de rang sont respectées. Les jeunes gens jouissent de la plus grande liberté et les jeunes filles, nubiles dès 14 ans, disposent elles-mêmes de leur main. Ses parents accordent l'entrée de la maison à tous ceux qui la veulent pour femme, et lorsque son inclination est confirmée, elle leur en fait part.
Le jour de Lug, ils invitent tous les soupirants à un banquet. Avant le repas, la jeune fille présente aux convives un baquet d'eau pour se laver. Celui auquel elle le présente en premier est celui qu'elle a choisi. 

Vous voyez que contrairement à leurs consoeurs romaine et grecque, les Gauloises ont la vie belle. De plus, elles participent activement aux actes de guerre. Armées d'épées et de haches, elles se jettent tout à la fois sur l'ennemi romain et sur le fuyard gaulois pour l'obliger à se battre.

Le courage de la femme celte est également attesté par des histoires de femmes employées aux champs et qui ne s'interrompent que quelques minutes dans leur travail pour aller... accoucher.

Contrairement aux Romaines qui n’ont aucun droit de cité, les Gauloises, en plus, participent aux affaires publiques. Les Latins s'étonnent d’ailleurs de la place occupée par les femmes, que ce soit chez les Gaulois ou dans la plupart des peuples dits "barbares". Lors de leur conquête des Gaules, les armées romaines seront surprises de rencontrer des peuplades celtiques dirigées par des femmes.

Le seul point noir de ce tableau idyllique se situe dans le cadre de la vie privée, où la femme dépend totalement de son homme (époux, père), qui a le pouvoir absolu sur elle. Une manière, on va dire, de canaliser l’angoisse masculine vis-à-vis de la puissance que la Femme incarne, notamment celle de donner la vie. Car pour les Celtes, et toutes leurs traditions le disent, la Femme est la déesse, l’initiatrice, la messagère des Dieux, celle qui introduit l’homme dans le monde des Réalités Supérieures.

C’est cette mâle terreur associée aux conséquences de la conquête de la Gaule par Rome qui va entraîner la perte de ce statut pour les femmes, la disparition du sentiment d'admiration sans limite et d'adoration qu'on avait alors pour elles. La conversion des Gallo-Romains au christianisme va les enfermer dans un rôle dont elles mettront plus de deux mille ans à ressortir ..

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